Le sonnet
Repentir |
Texte :
Philippe Desportes, d'après Petrarca Musique : Gaël Liardon |
Je regrette en pleurant les jours mal employés À suivre une beauté passagère et muable, Sans m'élever au ciel et laisser mémorable Maint haut et digne exemple aux esprits dévoyés. Toi qui dans ton pur sang nos méfaits as noyés, Juge doux, bénin père et sauveur pitoyable, Las ! relève, ô Seigneur ! un pécheur misérable Par qui ces vrais soupirs au ciel sont envoyés. Si ma folle jeunesse a couru mainte année Les fortunes d'amour, d'espoir abandonnée, Qu'au port, en doux repos, j'accomplisse mes jours, Que je meure en moi-même, afin qu'en toi je vive, Que j'abhorre le monde et que, par ton secours, La prison soit brisée où mon âme est captive. Philippe Deportes (1546-1606) |
I' vo piangendo i miei passati tempi i quai posi in amar cosa mortale, senza levarmi a volo, abbiend' io l' ale, per dar forse di me non bassi exempi. Tu che vedi i miei mali indegni et empi, Re del cielo invisibile immortale, soccorri a l' alma disvïata et frale, e 'l suo defecto di Tua gratia adempi : sí che, s'io vissi in guerra et in tempesta, mora in pace et in porto ; et se la stanza fu vana, almen sia la partita honesta. A quel poco di viver che m'avanza et al morir, degni esser Tua man presta : Tu sai ben che 'n altrui non ò speranza. Francesco Petrarca (1304-1374) |
Ambition |
Texte :
Théophile Gautier (Poésies nouvelles) Musique : Gaël Liardon |
Poète, dans les cœurs mettre un écho sonore, Remuer une foule avec ses passions, Écrire sur l'airain ses moindres actions, Faire luire son nom sur tous ceux qu'on adore ; Courir en quatre pas du couchant à l'aurore, Avoir un peuple fait de trente nations, Voir la terre manquer à ses ambitions, Être Napoléon, être plus grand encore ! Que sais-je? être Shakspeare, être Dante, être Dieu ! Quand on est tout cela, tout cela, c'est bien peu : Le monde est plein de vous, le vide est dans votre âme... Mais qui donc comblera l'abîme de ton cœur ? Que veux-tu qu'on y jette, ô poète ! ô vainqueur ? — Un mot d'amour tombé d'une bouche de femme ! Théophile Gautier (1811-1872) |