Le triolet (rondeau ancien ou simple)

Le triolet contient huit vers, dont l'organisation est facilement compréhensible dans les exemples ci-dessous.

"C'est une de nos plus anciennes formes de poèmes, et elle n'a point varié depuis le moyen âge. Le premier exemple qu'on en connaisse se trouve au XIIIe siècle dans le Cléomadès d'Adenès le Roy. La vogue du triolet fut grande jusqu'à la Renaissance. Il disparaît à peu près de cette époque à la seconde moitié du XVIIe siècle. (...) On le trouve tantôt en strophes, tantôt isolément." Charles Le Goffic, Edouard Thieulin - Nouveau traité de versification française, quatrième édition, 1903.


Le vieux trouvère

Texte : Gaston Couté (Oeuvres de jeunesse - chanson)
Musique : Gaël Liardon

Dans ce temps-là, je n'avais rien,
Rien du tout dans mon escarcelle,
Et ma lyre était tout mon bien ;
Dans ce temps-là je n'avais rien
Que de grands trous à mon pourpoint
Et le cœur de ma damoiselle.
Dans ce temps-là je n'avais rien,
Rien du tout dans mon escarcelle.

J'allais chanter dans les manoirs
La geste du vieux Charlemagne,
Et, gueux d'argent, riche d'espoirs,
J'allais chanter dans les manoirs
Devant les dames aux yeux noirs
Dont les barons faisaient compagne.
J'allais chanter dans les manoirs
La geste du vieux Charlemagne.

On m'aimait... j'étais adoré
Car j'avais ce qu'il faut pour plaire :
Le regard vif, l'air déluré ;
On m'aimait... j'étais adoré
Et m'étais toujours figuré
Qu'on vivait d'amour et d'eau claire.
On m'aimait... j'étais adoré
Car j'avais ce qu'il faut pour plaire.

Je payais souvent un baiser
D'un rondel ou d'une ballade
Lorsqu'on voulait bien me laisser,
Je payais souvent un baiser
Comme ça, sans jamais toucher
A ma bourse toujours malade,
Je payais souvent un baiser
D'un rondel ou d'une ballade.

Quand ma toute belle voulait
Un collier d'or aux lueurs folles
Pour entourer son cou fluet,
Quand ma toute belle voulait !...
Je lui faisais un chapelet
D'éblouissantes lucioles,
Quand ma toute belle voulait
Un collier d'or aux lueurs folles.

L'avenir était devant moi
Comme un jardin couvert de roses
Et, plus riant que pour un roi,
L'avenir était devant moi...
Mais, maintenant, au vieux beffroi
Vont sonner mes heures moroses.
L'avenir était devant moi
Comme un jardin couvert de roses.

Riche et vieux !... las ! m'ont dit adieu
Jeune pastoure et gente dame
Que mes cheveux blancs tentaient peu.
Riche et vieux !... las ! m'ont dit adieu
Car je n'attends qu'un mot de Dieu
Pour voir, vers lui, voler mon âme.
Riche et vieux !... las ! m'ont dit adieu
Jeune pastoure et gente dame !...


Gaston Couté (1880-1911)


Puisque je sais que vous m'aimez

Texte : Charles Le Goffic (Amour Breton, Triolets à ma mie)
Musique : Gaël Liardon

Puisque je sais que vous m'aimez,
Je n'ai pas besoin d'autre chose.
Mes maux seront bientôt calmés,
Puisque je sais que vous m'aimez
Et que j'aurai les yeux fermés
Par vos doigts de lis et de rose.
Puisque je sais que vous m'aimez,
Je n'ai pas besoin d'autre chose.

Je voudrais mourir à présent,
Pour vous avoir près de ma couche,
Allant, venant, riant, causant.
Je voudrais mourir à présent,
Pour sentir en agonisant
Le souffle exquis de votre bouche.
Je voudrais mourir à présent,
Pour vous avoir près de ma couche.

S'il fallait, comme au temps jadis,
Franchir des monts, sauter des fleuves,
Combattre en plaine un contre dix,
S'il fallait, comme au temps jadis,
Jouer pour vous les Amadis,
Mon cœur bénirait ces épreuves,
S'il fallait, comme au temps jadis,
Franchir des monts, sauter des fleuves.

Jasmins d'Aden, œillets d'Hydra,
Ou roses blanches de l'Écosse,
Fleurs d'églantier, fleurs de cédrat,
Jasmins d'Aden, œillets d'Hydra,
Dites-moi les fleurs qu'il faudra,
Les fleurs qu'il faut pour notre noce,
Jasmins d'Aden, œillets d'Hydra,
Ou roses blanches de l'Écosse.

Sur les lacs et dans les forêts,
Pieds nus, la nuit, coûte que coûte,
J'irais les cueillir tout exprès,
Sur les lacs et dans les forêts,
Hélas ! et peut-être j'aurais
Le bonheur de mourir en route,
Sur les lacs et dans les forêts,
Pieds nus, la nuit, coûte que coûte...

Charles Le Goffic (1863-1932)